Sous la plume de Servi’Plume #4

C’est au sein de mon coworking (NOW, basé à Rouen) que j’ai un jour croisé la route de Bérangère Plumey, détective privée. Je dois bien avouer qu’à l’annonce de ce métier, chargé de représentations, ont tout de suite résonné dans ma tête les premières notes du générique de Mike Hammer ! Pourtant, comme le précise Bérangère, pas d’imperméable en vue ni de journaux à trous, mais une profession très réglementée, en lien constant avec le droit. Alors on repousse le stéréotype du cigare fumant ou de la pipe (en plus c’est mauvais pour la santé !) et on mène l’enquête sur la réalité du métier…

Bérangère Plumey, c’est qui ?

Je suis une quarantenaire, maman de deux enfants qui a repris ses études à l’âge de quarante-cinq ans. Après vingt ans de salariat dans les ressources humaines en Île-de-France, et des soucis de santé qui m’ont amenée à me demander quels étaient, fut un temps, mes rêves, j’ai entrepris ma reconversion. Ayant rencontré une détective privée plusieurs années auparavant, j’ai découvert un métier qui m’a subjuguée. Le moment venu, je me suis renseignée et ai appris qu’il existait deux écoles privées, l’une à Paris, l’autre à Montpellier, ainsi que deux licences universitaires, une à Melun, l’autre à Nîmes, accessibles avec un Bac+2. Après avoir dévoré le livre Les détectives privés pour les nuls (tant utile aux futur·e·s détectives qu’à celles ou ceux qui souhaitent faire appel à leurs services) co-écrit par le directeur de l’école privée de Paris, j’ai décidé d’intégrer cette dernière. Mon arrivée à Rouen est un choix familial, nous sommes tombés amoureux de cette merveilleuse ville où le moindre café en terrasse devant les maisons à pans de bois me souffle un air de vacances. C’est donc après une formation d’un an faite de cours (droit, photographie, terrain) et de deux stages, que j’ai pu m’établir en tant que détective privée. Ce n’est pas une profession si éloignée des ressources humaines, je leur trouve notamment en points communs la mission d’aide, qui fait partie de ma personnalité, et le recours au droit que j’aime beaucoup. Si être formé n’est obligatoire que depuis 2003, c’est bel et bien aujourd’hui le cadre juridique qui régit la profession. Nous dépendons d’un organisme placé sous la tutelle du ministère de l’Intérieur. Lors d’une enquête, nous devons savoir quelles preuves nous avons le droit d’apporter, de quelle façon nous avons le droit de les obtenir, combien de fois nous devons les obtenir pour qu’elles soient recevables. Le domaine du droit étant en lien étroit avec l’humain, et donc en perpétuel mouvement, nous nous devons d’effectuer une veille juridique afin d’être informé·e·s des jurisprudences. J’aime à dire que c’est un métier d’équilibriste : j’oscille constamment entre prouver et respecter la vie privée de la personne concernée par l’enquête. Le risque ? Dépasser le cadre légal et voir mon travail rejeté par un juge. Ceci serait très fâcheux, tant pour ma réputation que pour l’ensemble de la profession. Ainsi, une règle d’or : respecter la loi. Prouver, oui. Par n’importe quel moyen, non. La profession, tout de même atypique, attire la curiosité et est l’objet de nombreuses représentations. Mon quotidien ne ressemble pourtant pas à celui d’un détective illustré par les séries des années 70 et 80. Mais il a une réalité : je n’ai ni horaires ni jours fériés. Je travaille selon les besoins d’une enquête. Font appel à moi : 1) les entreprises : dans le cadre d’une concurrence déloyale, de la recherche de débiteurs, d’enquête de préembauche ou de préassociation, en cas de suspicion de contrefaçon, en cas de vol répété, de harcèlement, etc. ; 2) les collectivités : dans le cadre de la vérification des agissements d’un agent, de dégradation de mobilier urbain, de vol répété, etc. ; 3) les assurances, les administrations : dans le cadre d’une suspicion de fraude au sinistre par exemple ; 4) les particuliers : dans le cadre d’un adultère (généralement la première mission à laquelle on pense lorsqu’on entend « détective privé » alors qu’elle ne représente que 20% de notre travail), en cas de recherche d’une personne disparue, etc. Toute enquête commence aujourd’hui par des recherches sur Internet (les réseaux sont une mine d’or !), puis se décline via de la surveillance, de la filature, des enquêtes de voisinage ou des auditions de témoins desquels nous tentons d’obtenir des attestations écrites recevables devant le juge. L’écrit domine. Certes, je prends des photos, mais ce que la justice retient sont mes comptes-rendus. Tout ce travail me permet d’obtenir des faisceaux d’indices qui finiront, après des heures de recherche, par devenir des preuves… dans le meilleur des cas.

Bérangère Plumey, qu’est-ce qui la fait vibrer ?

Si je pense à mon métier, ce qui me vient en premier c’est l’envie d’aider. C’est déjà ce qui m’animait dans les ressources humaines et c’est ce pour quoi, aujourd’hui, je peux passer dix heures à regarder une porte si nécessaire. C’est encore une fois un métier d’équilibriste. Il y a mon envie d’aider, l’incertitude de trouver, puis dans le cas où je ne trouve pas : savoir quand je dois m’arrêter, mon obligation de moyens, ma non-obligation de résultat, mon empathie qui me permet de comprendre la demande, mon positionnement qui m’oblige à gérer les émotions… On oscille constamment entre différentes données. J’aime l’adrénaline que me procure ma profession. Enquêter, chercher, trouver. Lorsque je trouve, quel soulagement ! J’ai accompli ma mission. Mais ce que j’ai trouvé, tout comme ce que je n’ai pas trouvé, n’est pas toujours simple à annoncer. Dans le cadre d’une recherche de personne disparue, je préviens immédiatement mon client ou ma cliente que je peux ne pas retrouver la personne, ou la retrouver mais qu’elle ne veuille pas être vue, ou la retrouver et qu’elle ne veuille pas que ça se sache. Ainsi, si je retrouve quelqu’un qui ne veut pas l’être, je suis dans l’obligation de respecter son choix et d’annoncer à la personne qui m’a engagée que je ne peux poursuivre les recherches. Le droit, avec lequel je suis en lien permanent me plait énormément ! Évoluer dans un cadre légal, aider contre l’injustice, me tenir informée des jurisprudences, travailler la stratégie avec les avocats, œuvrer avec un huissier de justice… j’adore ça ! Si j’aime la solitude que je trouve dans ce métier – en passant des heures à chercher sur Internet, en surveillance, en filature – je suis néanmoins entourée, encadrée. La CNAPS, Conseil National des Activités Privées de Sécurité, vérifie la légalité de nos missions et des moyens que nous employons. Je n’ai pas le droit, par exemple, de poser des balises sur un véhicule, de prendre des photos d’un lieu privé, d’enquêter sur une personne disparue si la police n’a pas déjà enquêté et classé l’affaire, etc. Un cadre très précis qui nous éloigne encore un peu plus des détectives de séries. Le CNAPS (qui nous délivre notre carte pro depuis 2012) nous permet donc de ne pas évoluer seul·e·s. Je collabore également avec certain·e·s collègues rencontré·e·s lors de ma formation, dans les associations d’anciens élèves. Ce sont des hommes et des femmes (50% dans ma promotion) de tous âges (de 20 à 60 ans lors de mon année de formation) qui peuvent par exemple prendre le relai pour une filature qui quitte mon territoire et s’étend sur les leurs. Huit-cents détectives privé·e·s recouvrent le pays. J’ai également adhéré au syndicat qui assure les fonctions d’information et de soutien. Je vibre aussi pour la notion de terrain. Bien sûr, cela est possible de par la disponibilité de mon entourage familial. C’est une des conditions pour exercer ce métier hyper chronophage, chargé d’imprévus. Ma personnalité avide de changement et moi-même sommes servies ! J’aime ma liberté et le fait de ne pas savoir à l’avance comment va se dérouler ma journée. Que vais-je voir ? Où vais-je aller ? Cela créé quelques anecdotes – comme lorsque j’invite mon frère chez moi pour son anniversaire et que toute la famille le fête sans moi à cause d’une enquête – mais ce qui peut passer pour des inconvénients aux yeux de certain·e·s est pour moi très excitant. Bien sûr, mener l’enquête – ce qui insinue évoluer dans la complexité du droit et l’hyper réglementation, chargée en adrénaline en poussant très loin ma réflexion – me fait vibrer, autant que la surveillance et la filature. Si nous apprenons à éviter les situations dangereuses – nous devons repérer les lieux et nous fondre dans le décor – nous apprenons aussi à partir lorsque nous sentons un danger approcher ou à avoir une histoire à raconter si nous sommes repéré·e·s. Je suis avant tout très bien entourée par mes proches qui rendent tout ceci possible. Je vibre également pour les moments de partage avec eux, avec mes amis. J’aime danser, faire la fête, rire. J’adore le sport, le triathlon, surtout la natation et la course à pied, et me suis lancé le challenge de courir un marathon pour mes cinquante ans.

Bérangère Plumey, c’est quoi son actu ?

C’est le déménagement du siège social de mon entreprise ADICIE à Mont-Saint-Aignan, de la prospection et la reprise des enquêtes après un mois d’août calme qui m’a permis de ralentir un peu le rythme.

Vous trouverez tous les renseignements nécessaires sur mon site adicie.fr. Je ne reçois que sur rendez-vous. Vous pouvez me contacter au 06.50.25.70.29 ou sur les réseaux sociaux.

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